Les passeports

 
Extrait du journal de bord (tournée mai - juin 2018)
 

Les passeports

Nous sommes vendredi, à un jour de départ. Il est midi, normalement la police envoie un sms lorsque les passeports arrivent, et là, toujours rien. Je décide d'aller au poste pour en avoir le cœur net. Il y va quand même du sort de 5 mômes. Juste avant d'arriver à Kežmarok, je reçois un coup de fil de la part des parents, que ça y est, le sms est arrivé, les passeports sont là. Je pile sec, fais demi-tour, et je fonce au bidonville pour prendre les parents afin qu'ils viennent récupérer les passeports. Juste avant d'arriver au bidonville je reçois un autre coup de fil. Fausse alerte. Il n'y a eu aucun sms, c'était Zdenka, la sœur aînée des mômes qui leur a dit que les passeports sont arrivés, elle a menti, elle a dit ça pour leur faire plaisir… Je repile, demi-tour, je fonce de nouveau au service des passeports, je saute la file d'attente, la préposé m'apprend que les passeports viennent d'arriver! Il est midi trente, le bureau ferme à 14h, vite, retour au bidonville. Heureusement il n'est qu'à 10 km, mais il y a de la circulation, et il pleut, la route est mouillée. Je fonce, Helena est dans tous ses états, je prends le deux mères, je leur demande est-ce qu'elles ont leurs cartes d'identités et les formulaires, oui, elles tiennent le tout dans leurs mains, on fonce à Kežmarok. Il est 13h. Il faut qu'elle fassent la queue, espérons que les fonctionnaires vont réussir à délivrer tous les passeports à temps, avant 14 h. Je pars régler d'autres choses, elle n'ont qu'à m'appeler quand tout sera fini. A 13h30 je reçois un coup de fil, une des mères s'est trompée, elle n'a pas pris sa carte d'identité, mais celle de sa mère, donc la grand-mère des trois des cinq petits aux quels on a fait faire les passeports, et en aucun cas on ne peut les lui délivrer, il faut qu'elle apporte sa carte d'identité à elle. Zdenko, son mari, n'a qu'à la chercher, elle doit être cachée derrière la télé. Je téléphone à Zdenko, lui dis où chercher, et je fonce au bidonville pour récupérer la fameuse carte. Entre temps il me rappelle, il n'arrive pas à la trouver. Je rappelle Kežmarok, on me dit qu'il faut qu'il cherche mieux, elle est certainement derrière le poste. J'arrive au bidonville, Zdenko n'a toujours rien trouvé. Je lui dis alors de venir avec moi à la Police, il n'a qu'à récupérer lui-même les passeports en tant que père. Il ne peut pas, il doit attendre un gars qui doit venir le chercher pour aller bosser (le gars ne viendra pas…). Alors, sans grand espoir, il est déjà deux heures moins dix, je fonce de nouveau à Kežmarok pour récupérer la mère qui n'a pas sa carte d'identité pour qu'elle vienne la chercher elle-même, peut-être que le Bureau des passeports fermera un peu plus tard… Lorsque je retrouve les deux mamans il s'avère que ce n'est pas l'épouse de Zdenko qui n'a pas sa carte d'identité, mais c'est l'autre maman, Anka, l'information par téléphone est mal passée, et Zdenko a cherché pour rien, et surtout, on a perdu un temps précieux… qui nous est maintenant compté, puisqu'en retournant à toute trombe à Kežmarok, avec Anka et sa carte d'identité, nous voyons marcher sur le trottoir la fonctionnaire du Bureau des passeports, il est 14h10, les portes du bureau ferment automatiquement, elle n'a pas pu nous attendre. Tout ce cirque pour rien! Sur les cinq passeports nous n'avons réussi à en obtenir que deux, cela fera trois gosses qui ne pourront pas partir. Tant pis, on n'a pas le temps pour les émotions, c'est dommage pour la troupe, car ce sera les moins performants qui partiront, et les autres, ce sera pour une autre fois. En tout cas, cela nous a bien occupé la veille du départ…