Décembre

On maintient les répétitions, avec Roman, sans Roman, avec Ciaš, sans Ciaš, avec les deux ou juste moi tout seul. Finalement on y arrive même en mode solo, c.à.d. juste moi à la balalaïka, mais pour cela il faut un support au niveau du chant impeccable. Donc il y a de quoi faire. On va voir si on va y arriver.

Malgré cette situation fragile je rédige quand même une demande de subvention auprès du Fond de soutien aux cultures des minorités nationales. Le temps presse, la date limite est vite arrivée, alors il faut faire vite, même si on ne sait pas concrètement sur quel projet formuler la demande. Alors on postule sur une tournée au printemps en Région parisienne, en demandant à Johann de Yepce et à Rémy de Besançon de nous envoyer des invitations pour compléter le dossier. Deux jours après nous recevons un courrier d´Alain Cluzel, nous proposant de reprendre contact avec le Festival de Montoire, qui serait intéressé par une programmation de notre groupe l´été prochain. Aussitôt fait, et en effet nous concluons un accord de principe, le résultat dépendra de tout une série de circonstances, surtout financières, on a de quoi faire…

Roman appelle de nouveau, cette fois pour demander qu´on lui prête une guitare basse pour aller jouer avec son groupe, leurs instruments ont fini au Mont de Piété, ils n´ont pas sur quoi jouer. Pas très enthousiastes, on lui prête la basse, mais toujours avec un petit serrement au cœur, si elle ne subira pas le même sort. Je ramène encore sa marmaille de Štiavnik, et espère avoir un we calme. Mais de nouveau un coup de fil de Roman, il vient de trouver un portable pas cher… bref la même histoire qu´avec les télés il y a deux semaines. Décidément, il est incorrigible. Bien sûr c´est non, on ne va pas marcher dans ces combines invraisemblables, et si ça doit continuer comme ça, autant d´arrêter le tout et rompre cette relation nuisible.  Je compte bien avoir une explication sévère avec lui lors de la prochaine répétition le lundi. Mais lorsque j´arrive au point de rdv à Lomnica pour prendre les jeunes à la répétition, pas de Roman en vue, les autres me disent qu´il ne viendra pas. J´ai un coup de sang. Il devait me rendre la basse, venir à la répétition qu´on lui a payé à l´avance, alors je dis aux autres de m´attendre et je vais directement chez Roman au bidonville. Je ne sais même pas où il habite exactement, je n´ai pas encore été chez lui depuis qu´il a déménagé chez Kévin. Je demande au premier gars que je vois, un ancien du groupe, de me conduire chez lui, et je le suis. C´est encore pire que la cabane d´avant. Avec la différence, que maintenant dans le carré qu´habite Roman il n´y a personne d´autre, donc il n´a plus l´excuse que ce sont les autres qui foutent le bordel, là, il n´y a que lui, et il aurait pu ranger tout ça un peu. J´entre dans la pièce, c´est pareil que dehors, un désordre indescriptible, pourtant Véronika, la compagne de Roman sait bien arranger leur habitat, mais décidément ce n´était pas leur jour. D´abord je ne vois pas Roman, je crois qu´il n´est pas là, mais il est allongé sous une montagne de sacs à couchage, qu´on lui a donné. Donne-moi la basse, je lui enjoins, pas un mot de plus, je suis en colère, mais je suis très calme, il comprend que ce n´est pas le moment de rigoler, et va chez sa mère pour me donner la basse. Je la prends et repars sans un mot. Le petit Erik apparait, tout en pleurs, on se croirait dans une scène de cinéma. Je fais monter les plus jeunes dans la voiture, les grands prendrons le bus et on part pour Kežmarok. Au local je convoque les grands, leur dis qu´on ne peut plus compter sur Roman, qu´il faudra mettre les bouchées doubles au niveau du chant. La répétition est dynamique et énergique, comme il faut, si on veut, on peut y arriver.

En moins de deux semaines, deux histoires de ce genre, ça suffit plus qu´amplement, le compte est bon. Roman a beau rappeler tous les jours, on ne répond plus, c´est fini pour un bon bout de temps, ce n´est vraiment pas possible de continuer comme ça.

Les répétitions ne sont pas très vaillantes. Ciaš ne peut pas être dans le coup du jour au lendemain, on galère, mais on va y arriver. Il faut persévérer, trouver une autre façon de travailler. Helena a enfin arrêté l´école, elle sera plus disponible, on pourra mieux travailler avec les filles, insister sur le chant. Tout en ayant bien à l´esprit, que hormis les défis au niveau artistique, il y aura, bien sûr, des histoires invraisemblables et imprévisibles à régler et à résoudre, car sans cela, ce ne serait pas imaginable… bref, c´est comme ça !