Slovenské národné múzeum

Musée national slovaque
 
 
Nous n'avons eu qu'une seule action en commun avec le Musée National Slovaque, mais elle fut de taille... Il s'agissait du vernissage de l'exposition photographique des Carrets qui a eu lieu le 5 novembre 2025 dans le bâtiment principal du Musée, sur les bords du Danube, à Bratislava. C´était l´aboutissement d´une longue série de démarches et tractations, car l'exposition était organisée dans le cadre de la donation de l´archive photographique de Claude et Marie-Jo Carrets à la République Slovaque via le Musée National Slovaque, plus précisément via sa succursale, le Musée de la Culture Rom à Martin. 
A l´origine des contacts ont été pris avec le Musée de la Culture Rom à Brno, en République Tchéque, mais l'action s´enlissait de ce côté là, alors on a bifurqué sur le Musée de Martin, et la chance était de notre côté, car les choses ont été prises en main par la responsable de la section rom du Musée, Adriana Daneková, qui s´est lancé avec passion et surtout détermination dans les interminables démarches relatives au compliqué processus de la donation. Le tout a pris deux bonnes années, durant lesquelles on n´était jamais sûrs du résultat, car le Musé National étant, comme son nom l'indique, une institution nationale, et de ce fait est sujet à tous les soubresauts et tremblements de terre qui déferlent sur la société slovaque et les institutions culturelles en particulier. L'instabilité politique et la polarisation de la société slovaque ont pour conséquence une instabilité chronique et autodestructive des institutions étatiques, avec des changements constants aux postes de direction, et les prises de décisions sont devenues très délicates, voire impossibles. Dans ce cadre, l'aboutissement du projet de la donation, de l'exposition, et dans une moindre mesure, mais quand même, de notre participation au vernissage, relève de l'impossible. Et cet impossible a été rendu possible grâce à la détermination, à l'obstination d ' Adriana Daneková, qui, malgré des évolutions de situations désastreuses, n'a jamais abandonné, et s'est battue contre vents et marées jusqu'à la victoire finale. Adriana a été très bien secondée par l'équipe qui s'est formée autour des Carrets, avec Johann Le Berre en tête, qui, grâce au soutien financier de la Fondation Bader Philanthropies ont conçu, réalisé et édité le catalogue accompagnant l'exposition, un magnifique ouvrage, la matérialisation mérité de tous les efforts fournis par tous qui ont pris part à cette aventure. 
Dès le départ, nous avons pris le parti de prendre part quoi qu´il arrive au vernissage, le point final en fin de ce parcours d'obstacles. Bien sûr, rien n'était moins sûr, car le moindre déplacement, et d'autant plus un aller-retour jusqu'à Bratislava, atteint des sommes astronomiques pour nous. Mais il était inimaginable que nous ne soyons pas présents à l´événement final. Notre ami Pavel Slaby, qui a déjà financé une exposition des Carrets à Klenovec, a promis de prendre les frais du voyage à sa charge, alors nous avons pu affréter un bus, et nous rendre le jour J à Bratislava. Soit dit en passant, nous avons déposé une demande de financement de ce voyage à la Section rom du Fond de soutien des minorités nationales auprès du Ministère de la Culture slovaque, mais notre demande n'a pas eu de suite. Nous avons formulé la demande de subvention comme un projet éducatif consistant en la visite de la capitale et de la participation au vernissage, cela aurait comporté une nuité à Bratislava, mais vu l'imperméabilité du Fond à nos demande, ce ne fut qu´un aller-retour, avec un bref passage sur les quais du Danube et quelques photos devant le Théâtre National. S'en est suivi le vernissage et le retour à Kežmarok aux alentours de minuit.  
Le Musée a fait le nécessaire en ce qui concerne la propagation de l'événement, et a envoyé des invitations officielles où il se doit. J'étais sûr de voir les représentants des institutions culturelles liées aux Roms, les très voyants politiques et militants de la cause tsigane, qui n'hésitent pas à récupérer le moindre fait public en leur faveur, mais personne n'est venu. Décevant, c'est tout ce que l'on peut dire, mais, hélas, pas surprenant... Par contre, les ambassadeurs de la France et du Japon étaient présents, de même que la directrice générale du Musée National Slovaque. L´ambassadeur de France, Mr. Suran, a eu un discours, et nous avons aussi eu l'occasion de discuter un peu ensemble. Tous les retours sont plus que positifs, nous aussi, nous avons eu une bonne impression de tout l'ensemble de l'action, que ce soit l'accueil, le déroulement de l'action, la prestation en elle-même, tout a bien marché, rien de négatif à signaler, que du positif !
Hormis le défi du financement du voyage à Bratislava, notre principal problème était, comme d'habitude, la participation de nos effectifs, avec comme toujours, la question épineuse de la présence ou non de Roman, notre seul musicien, au spectacle. Pour ce qui est des effectifs, le problème n´était pas aussi crucial que d'habitude, car il ne s'agissait pas d'une prestation sur scène, mais juste de quelques apparitions en début et au milieu du vernissage, avec une partie plus consistante à la fin. L'absence des anciennes danseuses, de nouveau alpaguées par Lubo, malgré leur retour vers nous au dernier spectacle à l'école de Hranovnica, n'est pas dramatique, tant pis pour elles. L'absence de Sara, notre danseuse soliste, partie la veille sans prévenir en Tchéquie, est un peu plus délicate, sans elle nous ne pourrons donner aucune des danses de notre répertoire classique, bon, il faudra miser sur le chant et les claquettes, alors on se débrouillera de la sorte. Avec tout ça, je ne savais pas quel bus réserver, combien on sera au final. Au final, comme d'habitude, nous étions une bonne trentaine, pour plus de la moitié des jeunes c'était leur première grande sortie, en plus dans la capitale de la République, Bratislava, donc un de ces événements dont on se souvient ensuite pour toujours. Petit grand bonus, tous nos anciens, qui travaillent maintenant à Bratislava, et que l'on ne voit plus que très rarement, sont venus et ont même participé au spectacle. Nous avons eu ainsi le plaisir de retrouver Tomáš, qui a ensuite excellé dans son solo de hip hop, il y a eu aussi Cyril, toujours aussi fou qu´avant, Stefan était là aussi, et le plus surprenant, est venu aussi Stano, que l´on n´a pas vu depuis une quinzaine d´années. Stano était là lors de la fondation du groupe, il est devenu ensuite un des piliers de notre ensemble, il a apporté énormément au niveau de la chorégraphie et de la formation des jeunes, mais un jour, pratiquement du jour au lendemain, il a changé du tout au tout, a viré de 180°, est devenu carrément odieux et nous a quitté avec la bouche pleine de calomnies, etc. A l'époque cela nous a sérieusement affaibli et blessé au plus profond de nous mêmes, mais il n´y avait rien à faire, on dirait qu'un mauvais sort avait été jeté...  Bien des années après il s'est fendu d'une lettre d'excuses, mais les choses en sont restées là, nous n'étions pas d'humeur à une reprise de contacts, les blessures étaient trop profondes. Et voilà que Stano réapparaît. Sans s'annoncer, nous ne l'avons pas prévenu de notre venue, il a du l´apprendre par les médias. Nous sommes en plein boum de la préparation au spectacle, il n´y a pas le temps pour des discours ni pour des bavardages, visiblement il est ému, alors je lui lance d'aller s'occuper des costumes, comme avant, et de nous rejoindre ensuite au chant lors de la production. Heureux, il réintègre son poste, et on attaque le spectacle. 
Nous nous sommes mis d´accord avec la chef du protocole qu´on interviendra en début du vernissage avec une chanson, ils ont proposé l´hymne rom, Djelem djelem, mais cela me semblait trop sérieux, inutilement pathétique, on se l'a gardé pour plus tard, dans une version moins formelle. Nous avons donc attaqué avec notre chant d'introduction habituel O Roma, qui a aussi un côté hymnique, mais sans prétention inutile. Ensuite il y a eu des discours officiels, de nouveau une intervention de notre part, cette fois-ci avec Je suis tsigane, toujours dans le mode mineur et grave, mais avec un côté théâtral et dramatique, donc sans exubérance rythmique, que l'on se réservait pour plus tard. De nouveau des discours, l´Ambassadeur de France, Mr. Suran prend la parole, suivi de Yechiel, et puis c'est à nous. Cela fait presque une heure que le flot des discours ne tarit pas, c´est le moment idéal pour apporter un peu d'énergie et de mouvement. Ca tombe bien, l'énergie, c'est notre terrain de prédilection, notre mission en ce bas monde, dirais-je sans prétention en tombant les pieds joints dans le pathétique, il n´y a pas de raison d'user d´expression fortes lorsqu´elles sont portées par la véritée ! :)   Alors on met le paquet, du rythme, des claquettes, des rires et des fous rires notamment des amis de l'ambassadeur, qui manifestement n'en revenaient pas de le voir évoluer sur le parquet dans les bras d'une de nos danseuses. Au début je ne savais pas si nous allions lancer aussi notre subtile spécialité, la danse avec les spectateurs, le public me paraissait un peu guindé, sérieux et solennel. Madame la Directrice générale du Musée National slovaque, qui était assise aux côtés des ambassadeurs de France et du Japon, avait l'air d'être bien stricte et sérieuse, pas du tout du genre à aller faire le guignol sur scène. Par précaution j'ai demandé discrètement à son assistant si cela serait opportun, horrifié, il m'a répondu que surtout pas, en aucun cas ! Ok, soit, j'ai passé la consigne à Cyril et à Dominik de ne pas l'inviter à danser lorsque ce sera le moment de faire entrer les spectateurs sur scène. Et bien entendu, comme souvent en pareilles circonstances, c'est exactement le contraire qui s'est produit. Stefan, qui n'a pas entendu ce que je disais, est allé directement, avec un grand sourire vers elle, et elle, avec un grand sourire l'a suivie sur le parquet, et cela a donné une merveilleuse petite séquence de vidéo, que dès le lendemain s'est empressé de mettre sur la toile le fidèle assistant de la direction. 
Nous n'avons eu que des retours très positifs de tous les côtés, y compris de la part de Mme la Directrice. Nous aussi, nous étions très satisfaits de notre petite virée automnale dans la capitale et de notre prestation. Tout a été parfait, la rencontre avec les anciens du groupe, avec Martin Šulík, le régisseur du Cigán qui nous a rejoint malgré son emploi de temps hyper chargé, l´accueil au Musée, le passage au MacDo Yepce, et puis, il ne faut quand même pas oublier l´essentiel, le vernissage, l'aboutissement d´une montagne d´efforts de nos amis, avec pour en toile de fond la reconnaissance de l´investissement exceptionnel de Claude et Marie-Jo qui ont sillonné durant des années notre pays avec leurs appareils photos et des coeurs grands ouverts. Tout cela, ca fait une belle histoire, à laquelle nous sommes heureux d'avoir pu prendre part.